13 octobre 2012

Le train 8427 en provenance de Genève de Jeanne Sialelli (+18 ans)

Lecture effectuée en partenariat avec les éditions Blanche.


Attention, ce roman n'est pas un simple récit érotique. Le sujet abordé est relaté sans fard, sans tabou, sans pudeur. La lecture de ce livre est exclusivement réservée aux lecteurs majeurs et avertis, mais il reste cependant un risque qu'ils soient malgré tout choqués par ce contenu.



Éditions Blanche
Format Poche
Pages 141
Sortie le 18 octobre 2012
Prix 13,50€




Présentation de l'éditeur

Dans le train qui la ramène chez elle après un séjour chez sa grand-mère à Genève, une jeune fille est contrainte à se livrer à plusieurs hommes dans un compartiment du train. Malgré la peur qui l’étreint, elle prend plaisir à cette violence qui se déchaîne sur elle.
Dans ce court roman érotique, Jeanne Sialelli aborde sans tabou et avec un grand talent d’écrivain la délicate question du viol et de son fantasme chez les femmes. Un livre qui ne laisse pas insensible et dont l’écho perdure bien après l’avoir terminé. Ce roman est, selon moi, destiné à entrer dans la bibliothèque des grands textes du genre.

Mon avis

Jeanne va subir le pire qui puisse arriver à une femme. Dans ce train 8427, dès la fermeture des portes, l'horreur va la saisir, la posséder et l'anéantir. Dans cet acte odieux, ignoble, monstrueux, elle sera violentée, donnée, vendue aussi et le plus dérangeant aimée. Un homme sortira du lot avec sa gentillesse et son attention à un moment donné. Elle veut croire en lui comme un sauveur qui aura pitié de sa détresse. Dans toute cette brutalité, il est l'espoir auquel elle se raccroche pour ne pas sombrer. Pourtant il est le plus dangereux, le chef, l'instigateur de toute cette mise en scène sordide. Cette dualité est perverse et angoissante. Car le pire, c'est que bien des mois après, il hantera encore l'esprit de Jeanne.

Voici un récit troublant à plus d'un titre. Parler d'un tel sujet est on ne peut plus délicat et aborder l'idée même de fantasme est inimaginable. L'auteur ne le fait qu'à demi mot et on se dit heureusement. Parce que savoir qu'on mêle ces deux termes, on a juste envie de crier, de hurler notre consternation. Cette idée est amenée à pas feutrés et dans le contexte de l'acte décrit dans CE livre. Dans notre esprit, il ne pourrait en être autrement.

La lecture est déchirante, poignante, elle prend aux tripes, nous étouffe. La gorge nouée, contenant avec difficulté les larmes face à ce récit, tel est notre état tenant fébrilement ce livre entre nos doigts.

Jeanne avouera tout à son mari, et le pire, adviendra : le doute, puis le déni. "Tout cela n'est rien, ça va passer..." Puis viennent les questions : l'a-telle cherché ? Cache-t-elle quelque chose ? Le couple se déchire, l'amour s'effrite, le poids des années de bonheur ne pèse guère dans cette balance-là.

Petit à petit, Jeanne bascule dans une sorte de folie, errant en quête du chef de ses agresseurs. On cherche à comprendre pourquoi elle ne pense plus qu'à lui, à cet homme monstrueux. On est tenté de comparer son trouble à une sorte de syndrome de Stockholm. Certes elle n'a pas été séquestrée des mois, mais quatre heures de pure violence, où on ne lui laissera aucun répit, peuvent paraître une éternité.

La plume est tantôt rapide, avec des phrases courtes, tantôt lente, pesante. Elle suit le rythme de chaque scène, chaque émotion. Le plus déstabilisant sont les passages de la première personne à la troisième d'un seul coup. C'est assez perturbant, donnant une étrangeté au récit. Un coup c'est Jeanne qui narre son histoire, puis elle passe à l'impersonnel comme pour ne pas souffrir à certains moments. Et enfin, même son mari interviendra d'un seul coup. Un agencement très curieux qui nous fait perdre le fil. C'est peut-être pas plus mal en fait parce que le poids de cette souffrance est suffocant.

Un petit livre perturbant, un récit certes court mais une chose est sûre, plus jamais je ne monterai dans un train sans penser à Jeanne et à ce numéro 8427 et sans trembler d'effroi !

4 commentaires:

  1. ce "roman" n'est pas un livre érotique; je suis allé d'étonnements en surprises : de sa grand-mère attachante qui prépare au viol évident ou se mêlent horreur, érotisme et .... au mari qui...., la fin n'est pas attendue .
    Jeanne, l'écrivaine a-t-elle été elle-même violée? nous livre-t-elle les horreurs de son expérience? les relations aux hommes ne sont-elles que dominations physiques et psychiques ?
    tout cela dans une belle écriture simple et colorée
    bravo Madame Sialeli ! nous attendons le prochain roman

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    1. Je sais que ce roman n'est pas un 'érotique', disons que je ne savais pas où le classer.
      Je me suis posée la même question au sujet de l'auteur...
      Un roman que je n'ai pas lâché sans savoir la fin !

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    2. Merci de m'avoir lue. La réponse est non ; il n’est pas autobiographique. Néanmoins quand j’ai terminé ces pages, j’étais anéantie n’ayant probablement pas pris le recul nécessaire. C’est ce qui fait que je n’ai pu sortir que maintenant de mes tiroirs ce roman écrit il y a une quinzaine d’années. Quant à mon rapport au viol, j’arrive à comprendre la pulsion du meurtre mais pas le viol qui reste, à mes yeux, un acte encore plus lâche, encore plus abject.
      Étymologiquement, est érotique tout ce qui a rapport à l’amour. Eros, Dieu de l’amour…
      Puis par extension, est érotique ce qui provoque le désir amoureux ou sexuel. Que chaque lecteur ait sa lecture, son ressenti et qualifie le livre comme il l’entend….
      Merci encore, la solitude de l'écrivain 'est pas un vain mot! Jeanne Sialelli


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  2. Merci d'être venue répondre à nos interrogations. Pour la classification des genres, c'est toujours un sujet ouvert au débat et dont les avis divergent constamment.
    Je suis soulagée, pour vous, que ce livre ne soit pas autobiographique. Et du coup, je vous tire vraiment mon chapeau pour avoir pu l'écrire. Le récit est si fort, comme réel, quasi palpable, que j'étais certaine qu'une part de vécu y avait été relaté. Je comprends, du coup, votre besoin de recul. Je suis ravie de vous avoir lue et d'avoir découvert votre plume. Et j'aurais plaisir à vous lire encore et à échanger. Merci à vous.
    Nancy Marçon

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